Si Carole Dupessey avait récemment prévu de lever le pied professionnellement, la perspective de défendre le secteur du TRM en tant que vice-présidente de l’Union TLF lui a fait changer d’avis. C’est avec détermination qu’elle nous énumère les défis qui l’attendent dans les prochains mois.
L’histoire des transports Dupessey et de TLF ne date pas d’hier. « Nous sommes adhérents depuis la création de l’entreprise », indique Carole Dupessey qui se souvient que TLF a toujours répondu présent lors des événements importants qui ont marqué la vie de sa société. « Lorsque nous avons connu une grève, il y a 20 ans. Michel Mattar, le secrétaire général de la région, a été là pour nous accompagner et prodiguer ses précieux conseils. » Si elle n’a jamais pris de responsabilité localement, il y a trois ans Carole Dupessey est rentrée au comité de direction où son engagement a été remarqué par le président Éric Hémar. Et ce dernier de lui proposer logiquement un poste de vice-présidente, en charge du transport routier, en mars dernier.
« Cela tombait juste au moment où je venais de réorganiser mon entreprise, en nommant Emmanuel André comme Dg, explique-t-elle. Une décision qui devait me permettre de dégager du temps que je pensais utiliser à titre personnel, mais je ne pouvais pas refuser de devenir le porte-voix de la profession. J’ai donc accepté de relever le challenge. » Chacun des vice-présidents a son secteur de prédilection.
« Il est important d’avoir des gens qui viennent du métier », justifie Carole Dupessey. « Une entreprise de transport, c’est comme une cordée. Pour réussir une ascension, il faut éviter que les mêmes personnes occupent toujours la tête en fonction des difficultés. Cette métaphore est valable aussi au sein de TLF », avance-t-elle. La Haute-Savoyarde assure que contrairement à l’image qu’on peut avoir, 66 % des adhérents de l’Union TLF représentent des entreprises de transport et que 80 % d’entre elles ont moins de 20 salariés.
La transition énergétique, problématique numéro 1
« Nous sommes tous différents, mais dès lors que nous possédons des camions, nous subissons les mêmes problématiques comme celle d’assurer la transition énergétique », glisse-t-elle avant de rappeler que la profession n’a pas attendu qu’on le lui impose pour se préoccuper de réduire son empreinte environnementale. « Chez Dupessey, nous avons signé la charte Objectif réduction de CO2 de l’Ademe, dès 2009. On le sait peu, mais c’est un sujet sur lequel nous travaillons depuis des années. Nous avons baissé la consommation de carburant de nos véhicules de 30 % en 30 ans », détaille-t-elle.
Pour aller plus loin, il faudra aller vers un mix énergétique et trouver un modèle économique pour les véhicules au gaz, à l’électrique ou à l’hydrogène. « Les transporteurs ne pourront pas trouver la solution seuls, il faut travailler avec les chargeurs et les constructeurs. La guerre en Ukraine complique encore les choses, mais toute la filière doit avancer dans le même sens. » Ce message, elle entend le porter lors des prochaines réunions de la Task Force avec les autres organisations patronales. Je ne suis pas habituée à ce genre de rencontre, mais je l’ai trouvé très à l’écoute sur les sujets de la transition, de la formation et du recrutement », affirme-t-elle avec l’optimisme qui la caractérise.
« Des NAO difficiles à mettre en œuvre »
Lorsqu’on lui demande pourquoi TLF a été la seule OP à ne pas signer les dernières NAO du TRM, Carole Dupessey se montre lucide. « Lors des négociations, on porte le mandat de nos adhérents, et il faut tenir compte de leur avis. Tous les transporteurs aimeraient mieux payer leurs conducteurs, mais le projet d’accord en tant que tel était compliqué à mettre en œuvre. » Si TLF était prête à s’aligner sur les revalorisations salariales, l’organisation professionnelle avait principalement justifié son refus de signer en raison du délai imposé par les syndicats pour mettre en place une hausse de la complémentaire santé. Une augmentation que les adhérents de TLF jugeaient trop rapide.
Autre point d’achoppement : la question du chargement/déchargement qui ne relevait pas d’un accord de branche, selon l’organisation patronale, mais de décisions réglementaires. Elle poursuit : « j’ai le sentiment que dans nos entreprises subsiste davantage un problème de reconnaissance que de salaire. » C’est pourquoi elle souhaite travailler sur la pénibilité des chauffeurs, l’accueil sur site, le bien-être au travail et faire évoluer les conditions de chargement/déchargement. « TLF travaille sur un guide des bonnes pratiques », confie-t-elle. Carole Dupessey estime qu’il faut aussi repenser l’organisation du travail pour s’adapter aux changements sociétaux, notamment dans le fait de concilier vie professionnelle et vie personnelle en permettant aux salariés de rentrer chez eux le soir. « On a du mal à attirer des jeunes. Mais quand on y parvient, ils restent », souligne-t-elle.
Ouvrir les portes des entreprises
« Notre secteur est stigmatisé à l’extérieur mais bénéficie d’une bien meilleure image de l’intérieur. » Pour l’améliorer, la dirigeante veut inciter les entreprises à travailler sur la RSE et à communiquer davantage. « Il faut ouvrir nos sociétés et dialoguer avec ceux qui nous critiquent mais nous connaissent mal. » Ce qu’elle a réalisé dans sa région, où elle a rencontré le président de l’association de défense du Mont-Blanc, montée pour protester contre le nombre de PL traversant la vallée de Chamonix. « Je lui ai montré nos actions en faveur du développement durable et cela l’a surpris et intéressé », se remémore-t-elle.
Avec ce même état d’esprit, Carole Dupessey a aussi reçu France Nature Environnement. « Il est fondamental d’expliquer que le transport agit pour réduire son impact environnemental, que notre ascenseur social fonctionne et que nous sommes indispensables à l’économie. La crise sanitaire l’a démontré. Nous avons tout intérêt à expliquer ce que nous entreprenons au quotidien. Nous sommes des entreprises où le travail fait sens », rappelle-t-elle avec ferveur. Carole Dupessey, qui a officiellement pris ses fonctions lors de l’assemblée générale de l’Union TLF en juin dernier, va aussi poursuivre le travail engagé par son prédécesseur, Jean-Pierre Sancier, pour attirer des talents en privilégiant le dialogue avec les organisations syndicales.
Le prix de l’énergie, dossier chaud de la rentrée
Parmi les autres dossiers chauds qui l’attendent, celui du prix de l’énergie figure en haut de la pile. TLF accompagne déjà ses adhérents sur la mise en place du pied de facture. « Trop de transporteurs n’avaient pas encore mis d’indexation gazole, parce que cela peut parfois sembler être une usine à gaz. Nous les avons aidés à le faire et nous avons aussi attiré l’attention de la DGCCRF, pour qu’elle mène des contrôles auprès des chargeurs récalcitrants », précise-t-elle.
Mais cela ne suffira pas. Carole Dupessey constate que le carburant a tellement augmenté que certaines entreprises ont de sérieux problèmes de trésorerie. « Pour le moment, la profession bénéficie de la remise de 18 centimes au litre. Nous échangeons avec les pouvoirs publics afin d’obtenir ensuite un système pérenne pour nous aider à rester compétitifs. Le carburant est notre deuxième poste de coût et il va rester cher », prédit la vice-présidente qui portera ce combat avec les autres organisations patronales à la rentrée.
VC
—
Une femme aux multiples engagements
Présidente de Dupessey & Co, Carole Dupessey est une femme très impliquée dans la vie de son entreprise et des entreprises. Un engagement de tous les instants qui lui a valu d’être nommée officier de l’ordre du Mérite en 2021 après avoir obtenu la Légion d’honneur en 2012. Outre ses nouvelles fonctions de vice-présidente à l’Union TLF, elle est membre du conseil de surveillance d’une filiale du Crédit du Nord et du conseil d’administration d’un organisme de HLM de Haute-Savoie.
Fonction qu’elle occupe aussi au sein du groupe Ecomédia, du club Prisme et du Medef Haute-Savoie. Elle est par ailleurs juge auprès du tribunal du commerce d’Annecy et membre de la CCI de Haute-Savoie. « Rencontrer des gens venus de tous horizons ouvre l’esprit », justifie celle qui a aussi créé le fonds de Dotation Dupessey & Co, il y a 4 ans. Ce fonds finance par exemple l’association « Ma chance Moi aussi » dont la vocation est d’offrir plus d’égalité aux enfants les plus vulnérables.
Source : Transportinfo.fr
Carole Dupessey (présidente de Dupessey & Co) : En mission pour le TRM